Pneumopathie aigue infectieuse
Code/s CIM-10 : J12, J13, J14, J15, J16
Auteur : Dr. Carmelo Lafuente
Dernière mise à jour : 31/08/2023
Infection du parenchyme pulmonaire provoquant une inflammation aiguë et souvent une répercussion générale et d'autres organes. Très fréquente à tout âge, partout dans le monde, elle reste une des principales causes de décès d'origine infectieux.
Diagnostic : tableau clinique évocateur + confirmation par une imagerie pulmonaire. Les examens microbiologiques ne sont pas faire pas en routine, mais recommandés chez tout patient avec des signes de gravité, principalement patients hospitalisés.
Chez des adultes hospitalisés, un germe causal n'est isolée que dans 30 - 40 % des cas avec microbiologie conventionnelle (crachat, hémocultures, antigènes, PCR ciblée) et dans 60 - 85 % si on ajoute une PCR multiplex.
Causes :
Large variété de microorganismes responsables possibles. Pneumocoque et Haemophilus restent les bactéries les + fréquentes. Les virus sont une cause fréquente (23 à 35% des adultes hospitalisées) : grippe, rhinovirus et autres virus respiratoires.
La fréquence des bactéries intracellulaires (Mycoplasme, Legionella ...) varie largement entre études.
Traitements
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Amoxicilline
Traitement de 1er choix d'une pneumopathie sans signes de gravité (Recos USA 2019, Pakhale 2014)
5 jours de traitement suffisent, si pneumopathie pas très grave, quel que soit l'antibiotique choisi (Recos USA 2019) et même seulement 3 jours selon quelques études (Dinh 2021)Traitement de 1er choix :
Si pas de signes de gravité, traitement ambulatoire -
Amoxicilline + Ac. clavulamique
1er choix chez le patient âgé, BPCO, avec des comorbidités ou dans les suites d'une grippe (Recos USA 2019)Traitement de 1er choix :
Pas de signes de gravité, mais patient BPCO, âgé ou comorbidités -
Macrolides : Clarithromycine, Azithromycine
En monothérapie, en cas d'allergie à l'amoxicilline ou de forte suspicion clinique de germe intracelulaire (pneumopathie atypique).
En association, chez les patients hospitalisés, patients avec des signes de gravité ou après échec d'une monothérapie avec un bêta-lactamide (Garin 2014, Recos USA 2019)Traitement de 1er choix :
Si allergie à la pénicilline, ou germe intracellulaire suspecté -
Céphalosporines de 3ème génération : Cefotaxime, Ceftriaxone
Chez les patients avec signes de gravité, ou hospitalisés avec facteurs de risque. L'association à un macrolide semble améliorer les résultats, surtout dans les cas les plus sévères (Garin 2014)Traitement de 1er choix :
Si signes de gravité, ou patient hospitalisé -
Fluoroquinolones avec activité anti-pneumocoque : Levofloxacine, Moxifloxacine
Alternative en monothérapie en cas d'allergie aux bêta-lactamines et/ou chez les patients hospitalisés avec des signes de gravité. Tenir compte du risque d'effets indésirables cardiaques et neurologiquesChez certains patients :
Si signes de gravité et allergie aux bêta-lactamines
Traitements alternatifs, 2ème ligne :
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Corticoïdes : Prednisone
Dans les pneumopathies graves, un traitement court (prednisone 40 - 60 mg/j ou hydrocortisone 200 mg/j, x 3 - 8 jours) a montré une amélioration de l'évolution clinique et de la mortalité dans plusieurs essais randomisés (Stern 2017, CRICS-TriGGERSep 2023). A éviter chez les patients avec grippe ou infections à champignons (aspergillus)Chez certains patients :
Si pneumopathie grave, en cure courte -
Piperacilline + Tazobactam
Si patient à risque d'infection par Pseudomonas : mucoviscidose, bronchiectasies, antécédents d'infection à PseudomonasChez certains patients :
Risque ou suspicion de Pseudomonas -
Linézolide
Pneumopathie grave post-grippal, pneumopathie à Staphylococcus aureus résistant à la meticilline (SARM)Chez certains patients :
Pneumopathie post-grippe ou suspicion de Staphylocoques -
Antigrippaux - Inhibiteurs des neuraminidases : Oseltamivir
Dans la pneumopathie de la grippe, quel que soit le délai après l'apparition des premiers symptômesChez certains patients :
Pneumopathie grippal -
Métronidazole
Souvent utilisé dans les pneumopathies d'inhalation, en association à un bêta-lactamide, mais les dernières recos considèrent qu'il est inutile, sauf si abcès pulmonaire ou empyema (Recos USA 2019)Chez certains patients :
Si abcès pulmonaire ou empyema -
Doxycycline
Une alternative pour couvrir les germes intracelulaires s'il n'est pas possible d'utiliser un macrolide ni une fluoroquinoloneChez certains patients :
Alternative aux macrolides et fluoroquinolones
Examens diagnostiques
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Rx Thorax face + profil (F+P)
Facilement disponible, reste le 1er examen fait en pratique. Inconvénient : elle est peu sensible (sensibilité 43-50% comparée au scanner) (Self 2013)Examen de choix pour le diagnostic :
1er examen pour le diagnostic de la pneumopathie -
Scanner Thoracique
Examen de référence (gold standard) pour le diagnostic de pneumopathie (sans contraste). A faire en cas de doute après Rx simple, ou chez certains patients où la Rx est moins performante (ex. patient âgé, peu mobile)Examen de choix pour le diagnostic :
L'examen le plus précis pour le diagnostic de pneumopathie -
Procalcitonine (PCT)
Aide à différentier les infections respiratoires bactérienne sévères des infections virales. Diminue rapidement avec la résolution de l'infection.
Utile comme aide à la décision d'initier un traitement antibiotique, ou si initié, du moment de l'arrêterExamen de choix pour le diagnostic :
Différentier une origine bactérienne ou virale -
Echographie pulmonaire
Plus sensible (88 - 95%) que la Rx simple pour le diagnostic de pneumopathie, avec une spécificité similaire (Long 2017)Examen additionnel :
Très sensible, possible au lit du malade -
Urines : Antigène soluble du Pneumocoque
Pas en routine. A faire chez les patients avec des signes de gravité (Recos USA 2019)Chez certains patients :
Si signes de gravité -
Urines : Antigène soluble de Legionella
Pas en routine. A faire chez les patients avec des signes de gravité, ou si tableu clinique suggestif ou si facteurs épidémiologiques (Recos USA 2019)Chez certains patients :
Si signes de gravité ou tableu clinique suggestif -
COVID-19 : PCR SARS-CoV-2 (sécretions respiratoires)
Toujours à considérer, en fonction de la prévalence du SARS-CoV-2Chez certains patients :
En période épidémique -
Virus de la grippe (A et B) - PCR (sécretions respiratoires : nasopharynx)
Si en période épidémique grippal (Recos USA 2019)Chez certains patients :
En période épidémique
Autres examens, 2ème intention :
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Crachats : Examen cytobactériologique et culture
Pas en routine. Faire si : patients grave, traitement antibiotique récent, suspicion de Pseudomonas ou Staphylocoque, échec du traitement antibiotique empirique (Recos USA 2019)Examen additionnel :
Chez patients graves ou suspicion de résistance -
Examen additionnel :
Si signes de gravité -
Fibroscopie bronchique et lavage broncho-alvéolaire (LAB)
En cas d'échec de plusieurs traitements antibiotiques, ou chez certains patients : immunodéprimés, suspicion de cancer bronchique, d'aspirationChez certains patients :
Si échec du traitement, patient immunodéprimé, suspicion cancer -
Virus respiratoires - PCR multiple (sécretions respiratoires : nasopharynx, aspiration bronchique)
Peut diagnostiquer des pneumopathies d'origine virale autre que grippe et COVID : rhinovirus, VSR, autre coronavirus. Utile si tableau clinique suggestif d'infection virale, pneumopathie interstitielle, échec des antibiotiques ...Chez certains patients :
Suspicion pneumopathie d'origine virale
Scores, Listes utiles
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Le score le mieux validé pour prédire le risque de décès à 30 jours et évaluer le besoin d'hospitaliser le patient
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Estimation du risque de décès à 30 jours et donc du besoin d'hospitaliser le patient. Moins éprouvé dans des essais cliniques que le PSI
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Simplification du CURB-65, sans l'urée. Même utilité, avec un peu moins de précision
Diagnostic différentiel
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En période d'épidémie / pandémie, une pneumopathie apparement habituel peut être une infection COVID-19
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L'infarctus pulmonaire peut ressembler fortement à une pneumopathie, y compris la fièvre et le Sd. inflammatoire
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Une obstruction bronchique favorise des infections à répétition du lobe / segment atteint, car empèche l'évacuation des sécréctions repiratoires
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Suspecter un germe intracelulaire si tableau atypique : < 40 ans, infiltrat interstitiel, début progressif, fièvre modéré, manifestations digestives ou neurologiques associées
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A suspecter si : contexte épidémique, pneumonie d’allure sévère, souvent bilatérale (pas toujours), début progressif, pouls dissocié, présence de signes digestives et/ou neurologiques (troubles de la conscience, confusion), échec des bêta-lactamines
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Une vascularite avec atteinte pulmonaire peut mimer une pneumopathie infectieuse, et viceversa, surtout si pneumopathie multilobaire ou bilatérale, interstitielle et ayant un cours sous-aigu,
Références
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CDC EPIC 2015. Cohorte nationale : Community-Acquired Pneumonia Requiring Hospitalization among U.S. Adults. N Engl J MedThe incidence of community-acquired pneumonia requiring hospitalization was highest among the oldest adults. A pathogen was detected in 38% of all patients: The most common pathogens were human rhinovirus (9% of patients), influenza virus (6%), and Streptococcus pneumoniae (5%)
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CRICS-TriGGERSep 2023. Essai randomisé multicentrique : Hydrocortisone in Severe Community-Acquired Pneumonia. N Engl J MedWe assigned adults who had been admitted to the intensive care unit (ICU) for severe community-acquired pneumonia to receive intravenous hydrocortisone (200 mg daily for either 4 or 8 days as determined by clinical improvement, followed by tapering for a total of 8 or 14 days) or to receive placebo. .. By day 28, death had occurred in 25 of 400 patients (6.2%; ..) in the hydrocortisone group and in 47 of 395 patients (11.9%; ..) in the placebo group ... those who received hydrocortisone had a lower risk of
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Dinh 2021. Essai randomisé : Discontinuing β-lactam treatment after 3 days for patients with community-acquired pneumonia in non-critical care wards (PTC): a double-blind, randomised, placebo-controlled, non-inferiority trial. LancetAdultes hospitalisés pour pneumopathie, non réanimatoires, âge moyen 73 ans. Taux de guérison à 15 jours : 77% avec 3 jours d'antibiotique, 68% avec 8 jours d'antibiotique
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File 2023. Revue narrative : Community-Acquired Pneumonia. N Engl J MedKEY CLINICAL POINTS: 1)The diagnosis of community-acquired pneumonia is made on the basis of compatible symptoms and signs, with evidence of a new infiltrate on an imaging study. 2) Most outpatients with mild community-acquired pneumonia can be treated empirically without diagnostic testing for bacteria. However, testing for SARS-CoV-2 and influenza should be considered. 3) A comprehensive approach to microbiologic testing for hospitalized patients is recommended ... 4) The choice of antimicrobial therapy
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Gadsby 2016. Cohorte régionale : Comprehensive Molecular Testing for Respiratory Pathogens in Community-Acquired Pneumonia. Clin Infect DisHaemophilus influenzae and Streptococcus pneumoniae were the main agents detected, along with a wide variety of typical and atypical pathogens. Viruses were present in 30% of cases.
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Holter 2015. Cohorte régionale : Etiology of community-acquired pneumonia and diagnostic yields of microbiological methods: a 3-year prospective study in Norway. BMC Infect DisEtiology was established in 63% of patients: 28% pure bacterial, 15% pure viral infections, and 19% viral-bacterial coinfections. S. pneumoniae (30%), influenza (15%) and rhinovirus (12%) were most commonly identified pathogens
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Long 2017. Méta-analysis d'études diagnostiques : Lung ultrasound for the diagnosis of pneumonia in adults: A meta-analysis. Medicine (Baltimore)Sensibility and specificity were 0.88 (95% CI: 0.86-0.90) and 0.86 (95% CI: 0.83-0.88), respectively. Lung ultrasound can help diagnose adult pneumonia with high accuracy
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Pakhale 2014. Révision systématique Cochrane : Antibiotics for community-acquired pneumonia in adult outpatients. Cochrane Database of Systematic Reviews .Individual study results do not reveal significant differences in efficacy between various antibiotics and antibiotic groups
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Recos USA ATS/IDSA 2019. Recommandation de pratique clinique : Diagnosis and Treatment of Adults with Community-acquired Pneumonia. An Official Clinical Practice Guideline of the American Thoracic Society and Infectious Diseases Society of America. Am J Respir Crit Care MedDernières recommandations nord-américianes (en anglais) sur la prise en charge des pneumopathies
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Self 2013. Etude diagnostique : High discordance of chest x-ray and computed tomography for detection of pulmonary opacities in ED patients: implications for diagnosing pneumonia. Am J Emerg MedChest x-ray characteristics for detection of pulmonary opacities included: sensitivity 43.5%; specificity 93.0%; positive predictive value 26.9%; and negative predictive value 96.5%
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Stern 2017. Révision systématique Cochrane : Corticosteroids for pneumonia. Cochrane Database of Systematic ReviewsCorticosteroid therapy reduced mortality and morbidity in adults with severe community acquired pneumonia ... Corticosteroid therapy was associated with more adverse events, especially hyperglycaemia